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Saint-Ouen Luttes

L'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes

n°16 - 27 octobre 2001

SOMMAIRE   Le ras le bol des éboueurs Les Afghans de Calais Le classement des puces Logement : Avant la trêve d'hiver, ça expulse sec ! Réunion du plan prévention contre la violence au collège Joséphine Baker : Jugez-en vous même Friche RER Victor Hugo : A propos du poumon vert Notes de voyages à Jérusalem (Août 2001) Editorial : Non à la guerre d'Afghanistan et à ses dommages collatéraux  

Le ras le bol des éboueurs

Si l'enlèvement des ordures ménagères relève du pouvoir des municipalités et de leurs regroupements, ceux-ci font de plus en plus appel à des sociétés privées pour réaliser ce service public. La SITA assure ainsi le ramassage des ordures pour Saint-Ouen, Bondy, Aulnay, Noisy-le-Sec, MontreuilŠ En 2000, elle a enregistré une progression de 12,4 % de son chiffre d'affaires qui atteint 5 milliards d'euros, (plus de 32 milliards de francs). Cette société appartient à la multinationale Suez-Lyonnaise des Eaux dont les actionnaires ont vu leur dividende augmenter de 10 % en 2000.

Tout cela se fait sur le dos des travailleurs qui, au dépôt de Pantin, se sont mis en grève pendant une semaine du 7 au 14 octobre. La goutte qui a fait déborder le vase provient de l'embauche d'un intérimaire à six jours de travail par semaine alors que, depuis 1989, les salariés ont obtenu, à l'issue d'un mouvement de grève, deux jours de repos par semaine. Accepter les conditions de ce recrutement, c'était ouvrir la brèche pour rendre encore plus difficile les conditions de travail, déjà insupportables : des journées pouvant s'étendre jusqu'à dix ou douze heures, des lumbagos à répétition, un taux d'absentéisme de plus en plus élevé dû à la surcharge de travail, le tout pour des salaires de base inférieurs à 8 000 F (1 219 euros) brut pour les ripeurs et à 9 140 F (euros) pour les conducteurs.

Après une semaine de conflit, l'intérimaire a été embauché aux mêmes conditions que les autres salariés et la direction s'est engagée à n'entamer aucune sanction ni poursuite à l'encontre du personnel. Les tauliers rechignaient sur ce dernier point et il a fallu un ultime jour de grève pour que les salariés obtiennent satisfaction.

Laurent

 

Les Afghans de Calais

Inauguré en septembre 1999, le " centre d'hébergement et d'accueil d'urgence humanitaire " de Sangatte (800 habitants), situé à quelques kilomètres de Calais, a accueilli 78 000 étrangers depuis son ouverture. Avant cette date, c'est dans la rue qu'ils dormaient en attendant chaque nuit d'essayer de gagner l'Angleterre. Fin août, ces indésirables étaient environ 1700 (un record). Le 16 octobre dernier, ils étaient 1085 ( 60 à 70 % d'Afghans). Mais comment être sûr de ces chiffres puisqu'à part la Croix-Rouge qui " gère " ce centre, tout le monde fait comme s'ils n'existaient pasŠ

Migrants ? Réfugiés ? Clandestins ?

Au camp de Sangatte, ils s'entassent parce qu'on leur refuse le droit de choisir leur terre d'asile. Tous les jours, toutes les nuits, au su et au vu de tous, ils risquent leur vie pour tenter le passage vers le Royaume-Uni, comptant vivre moins misérablement. Bush, Blair, Chirac-Jospin et beaucoup d'autres chefs d'Etats appellent à la guerre contre le régime rétrograde et " terroriste " des Talibans. Pourtant, ils refusent d'accorder l'asile politique aux premières victimes de ce régime totalitaire : les Afghans qui se trouvent ici dans " nos " frontières, à Sangatte par exemple.

L'économie capitaliste européenne a soif de main-d'oeuvre sans aucun statut légal, obligée d'accepter n'importe quels salaires, horaires et conditions de travail. Lorsqu'une grosse entreprise met en concurrence plusieurs sous-traitants pour un marché quelconque, elle sait que très souvent la différence se fait sur la maigreur des paies des salariés des sous-traitants. Le fait d'être sans-papiers mène à accepter d'être sous payé.

Il n'y aurait pas de filières mafieuses de passeurs et de morts à nos frontières s'il n'y avait pas d'employeurs de sans-papiers, protégés par des Etats empêchant la libre circulation et l' installation des individus où bon leur semble. Les sanctions qu'encourent ces nouveaux esclavagistes sont dérisoires en France comme au Royaume-Uni.

Relou

 

Le classement des puces

Les dix hectares des puces de Paris Saint-Ouen viennent d'être classés en zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager. Tant mieux si cela leur permet d'échapper aux appétits voraces des promoteurs immobiliers. " Ce n'est pas un monument que l'on classe aujourd'hui, mais une ambiance populaire " affirme le président de l'Association de promotion et de défense des puces.

L'ambiance est populaire, à coup sûr, mais le paradis des chineurs est tout d'abord celui du tourisme et de l'import-export " haut de gamme " qui réalise les trois quarts du chiffre d'affaires des puces.

Léo

Logement

Avant la trêve d'hiver, ça expulse sec !

Le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées vient de sortir son 7ème rapport. Il mentionne notamment que, en dépit de la loi de lutte contre les exclusions, les expulsions de locataires ont augmenté de 22 % en 2000. Parmi les raisons de cet accroissement, la radicalisation de l'attitude des sociétés HLM ( privées, publiques ou d'économie mixte) est soulignée. Certaines saisissent les tribunaux plus rapidement, accordent des délais de paiement " parfois irréalistes " ; en outre, spécialement en Ile de France, il apparaît une tendance à faire libérer les logements des personnes en difficulté pour les proposer aux populations plus solvables.

L'accentuation de la pression des bailleurs est aussi perceptible à Saint-Ouen. Le 18 novembre, la Semiso, Société d'économie de rénovation et de construction de la ville Saint-Ouen, a procédé, rue Mathieu, à l'expulsion d'une famille de 6 personnes avec de jeunes enfants. Celle-ci avait un retard de loyer de 70 000 F, mais elle venait d'en rembourser 50 000F quelques jours plus tôt. Avec l'appui de militants du Droit au logement (DAL), la famille a protesté auprès des services sociaux municipaux. Finalement, la Semiso est revenue sur sa décision et la famille a retrouvé son logement le soir même. La vingtaine de familles qui squattaient l'immeuble vide de la Semiso, au 67, rue Albert Dhalenne a eu moins de chance.

Le 22 novembre, la police a procédé à leur expulsion et a muré l'immeuble. D'après son directeur, cet immeuble a été acquis il y a 6 mois par la Semiso et les travaux de réhabilitation devraient commencer dans un mois. A voirŠ Dans tous les cas, les expulsions sont menées plus rapidement que le lancement des travaux.

Laurent

 

Réunion du plan prévention contre la violence au collège Joséphine Baker

Jugez-en vous même

 

La réunion a commencé dans la bonne humeur : le substitut du procureur et un commissaire de police étaient venus rencontrer les personnels et les délégués des parents d'élèves: " on doit se serrer les coudes ", affirme le substitut, " il faut dépasser les limites de chacun de nos secteurs ", " les policiers sont des êtres humains "Š On l'a cru sur parole.

Les problèmes de manque d'effectifs sont arrivés : pour la police, la justice et l'éducation, un même constat de sous-effectif et de réduction des postes existants, bref il n'y aurait pas de problème entre nous, vu qu'on est tous fonctionnaires !

Les parents s'inquiètent pour le trajet jusqu'au collège. Il ne faut pas s'en faire : " il n'y a pas de zones de non-droit " affirme le commissaire.

Les autorités proposent des informations sur la toxicomanie et les armes à feu. La salle ne se dit pas intéressée. Erreur, leur répondit-on : "cela viendra. C'est juste une question de temps, vous êtes dans un collège récent ".

C'est alors que les parents d'élèves sont intervenus, au sujet des menaces de la CAF de supprimer les allocations des familles dont les enfants sont trop souvent absents.

La réponse du substitut fut éclairante : " mais pourquoi a-t-on invité les parents d'élèves ? ".

Paul

 

Friche RER Victor Hugo

A propos du poumon vert

Environ 80 habitants étaient présents à la réunion qu'ils avaient demandée pour avoir une explication sur l'avenir de la friche Victor Hugo. La maire et l'adjoint chargé de l'urbanisme avaient convié un représentant du cabinet d'architecte Roland Castro et un représentant de la Sidec, société d'économie mixte chargée de l'aménagement sur le 93.

Ceux-ci se sont lancés dans une présentation du projet qui n'a guère convaincu l'assistance. Quel serait le flux de voitures sur le boulevard urbain ? quel sera le nombre de voies ? quel espace sera réservé aux espaces verts ? aux bureaux ? aux logements ? quels types de logements seraient construits ? à toutes ces questions, les réponses des " experts " sont restées évasives.

De leur côté, les élus ont promis qu'un plan précis du projet serait transmis aux audoniens et qu'une nouvelle rencontre aurait lieu. Mais, eux non plus, n'ont pas convaincu les participants. Les habitants s'interrogent sur le bien fondé de ces réunions où l'on ne sait pas si l'équipe municipale est là pour prendre en compte l'avis de la population ou pour donner des informations qui, dans tous les cas, sont floues et qui arrivent le plus souvent après le lancement des travaux.

Unanimement, les habitants ont rappelé leur volonté de conserver le poumon vert que constitue la friche. Ils entendent rester vigilants, ils ont raison. On peut contacter le collectif Une friche en ville, chaque dimanche à partir de 14 heures sur la friche (rue Arago, derrière l'entrée du RER C).

Jean Dubuisson

 

Notes de voyages à Jérusalem

(Août 2001)

La ville moderne ressemble à n'importe quelle ville d'Europe, mais la présence permanente des soldats est frappante. Jérusalem-Est est en moins bon état, et les voitures qui circulent sont bien plus vieilles. Dans la vieille ville, alors que le quartier juif est bien entretenu, avec des maisons récentes reconstruites dans un style ancien, les autres quartiers ( musulman, chrétien et arménien) sont souvent délabrés. Les rues sombres et sales donnent sur de minuscules appartements d'une seule pièce où s'entassent des familles nombreuses. Plusieurs maisons détruites complètent le paysage : l'obtention d'un permis de construire prend souvent une dizaine d'année et coûte presque aussi cher que la maison. Bien des habitants bâtissent dans l'illégalité, au risque d'une démolition par les services israéliens. Le quartier musulman par exemple contribue pour 25 % des impôts de la municipalité, mais ne reçoit de services que pour 5% des dépenses.

Avec notre faciès européen, nous ne somme pourtant quasiment jamais contrôlés. Les Palestiniens qui passent en même temps que nous ont moins de chance, comme celui qui rapporte une caisse vide à l'extérieur avant de revenir sur le marché avec des fruits et légumes. Le même soldat lui demande ses papiers à la sortie et à l'entrée, faisant mine de ne pas le reconnaître. Les juifs Ethiopiens, noirs, sont largement utilisés par l'armée face aux Palestiniens mais sont mal vus par les autres et vivent dans des cités quand les blancs résident en centre-ville.

Des colons tentent de racheter des maisons hors du quartier juif et y plantent leur drapeau. Dans certaines cours, les voisins doivent se protéger par des grilles de métal pour éviter que les colons ne jettent leurs poubelles en direction des voisins palestiniens du dessous. Ces colons ont le droit de posséder des armes, y compris des fusils automatiques, et se déplacent souvent sous l'escorte de la sécurité israélienne en civil. Des caméras de surveillances, un peu partout complètent le dispositif.

La maison de Sharon est d'ailleurs dans le quartier musulman, ornée d'un gigantesque drapeau de plusieurs mètres de haut. Au cours de notre séjour, celui-ci a été bombardé de tomates pourries.

Mais autour de la ville, chaque colline est l'emplacement d'une colonie. Beaucoup sont encore en construction, et elles disposent de routes réservées, interdites aux Palestiniens, pour être reliées à Israël. Sur le versant des collines, on voit encore les restes des villages palestiniens qui ont été détruits pour créer un périmètre de sécurité.

Paul

 

Non à la guerre d'Afghanistan
et à ses dommages collatéraux

Les Américains, soutenus par leurs alliés anglais et français, bombardent l'Afganistan, pour éradiquer, paraît-il, un terrorisme qui continue à sévir sous la forme d'une menace "postale" à l'anthrax.

Combien de milliers de femmes et d'enfants afghans seront victimes de soi-disantes erreurs de frappes, pour venger les milliers de morts du World Trade Center? Bush, Blair, Chirac et Jospin ne nous le disent pas. On nous promet seulement une guerre longue et pas forcément limitée à l'Afghanistan.

Que ne feraient-ils pas pour restaurer l'image de marque écornée de l'impérialisme américain?

Que les USA discutent de l'après-Taliban avec certains Talibans dits "modérés" montre bien que la lutte contre le terrorisme est un prétexte pour faire régner dans cette région, un ordre qui a une forte odeur de pétrole et d'impérialisme.

Sous prétexte d'union sacrée des démocraties contre le terrorisme ils voudraient embringuer les travailleurs des pays riches contre les peuples des pays du Sud.

Alors qu'en Afghanistan les bombardiers tuent, les capitalistes licencient en rafale en France et aux USA Or la récession était déjà là, bien avant les attentats du World Trade Center.

La bourgeoisie en tire prétexte pour faire payer les frais de sa crise aux travailleurs, pour maintenir ses profits. On licencie chez Ford et chez Moulinex. On serre les cordons de la bourse pour les budgets sociaux et l'Etat est prêt à subventionner les compagnies d'aviation et d'assurance qui licencient et crient misère après s'en être mis plein les poches une décennie durant.

C'est le capitalisme qui est l'ennemi, pas les travailleurs des pays pauvres.

L'impérialisme et ses serviteurs, de droite comme de gauche, les Bush, Blair, Chirac et Jospin veulent nous embrigader dans leur guerre, pour leurs intérêts.

La lutte contre les licenciements, pour des conditions d'existence décentes, pour le maintien des protections sociales, doit se mener de pair avec le refus de leur sale guerre contre les peuples.

25 Octobre 2001

 

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