S O L

Saint-Ouen Luttes

L'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes

Numéro 13 du 12 mai 2001

 

Taxis en lutte contre les contrats de servage : 7 jours sur 7 à la G 7 *

Saint-Ouen : Un boulevard urbain à Victor Hugo ? *

Quel avenir pour les jeunes ? *

ALSTOM TSO : Non à la discrimination ! *

Algérie : Un pouvoir assassin ! *

Le SMIC c'est rien, moins que le SMIC c'est moins que rien ! *

Les sans logis s'invitent à la fac *

Editorial : Tous ensemble, Tous ensemble, oui, Contre les licencieurs *

 

TAXIS EN LUTTE CONTRE LES CONTRATS DE SERVAGE

7 jours sur 7 à la G 7

6 600 F par mois pour un travail de 10 heures par jour, 7 jours sur 7, tel est le revenu d'un travailleur qui loue un taxi à la compagnie G 7. Il touche environ 1 100 F de recettes journalières, soit 33 000 F par mois en travaillant à ce rythme. Mais il doit reverser ensuite 21 000 F à la G 7 pour la location du taxi. Ensuite, il doit louer la radio, 2400 F et payer l'essence, 3 000 F, et au final il lui reste 6 600 F pour 70 heures de travail par semaine. " Ce sont eux qui déterminent leur horaire, pas nous " réplique le responsable d'exploitation de la G 7. A l'entendre, si les locataires de taxi font deux fois 35 heures c'est parce qu'ils le veulent bien. Pourtant avec le tarif de location que leur impose la G 7, les chauffeurs doivent travailler 70 heures par semaine pour toucher un salaire minimum.

Les chauffeurs dont le dépôt est situé rue Eugène Berthoud à Saint-Ouen se sont mis en lutte pour mettre fin à cette exploitation et obtenir une baisse du tarif de location de leur voiture ; ils souhaitent aussi l'application de l'arrêt de la Cour de cassation du 19 décembre 2000 qui a requalifié le contrat de location en contrat de travail. L'aboutissement de ces revendications permettrait une amélioration de leurs horaires de travail et de leurs revenus. Pour se faire entendre de la direction, ils multiplient blocages des garages de la société, manifestations, rassemblements... Le 1er mai le porte parole du collectif G 7 a été jusqu'à camper devant le garage de la G 7 pour mener une grève de la faim. Après une semaine, il a cessé son action suite à la décision de la direction de la G 7 de geler la hausse des tarifs de location (qui aurait du se produire en avril) et à l'acceptation d'une réunion de la commission de concertation, le 6 jui,n pour faire évoluer le contrat de location.

En 1998, le garage des taxis G 7, branche qui s'occupe de la location des taxis, employait 96 personnes et avait réalisé 133 millions de francs de chiffres d'affaires pour la location de 747 véhicules, soit 178 000 F par an par véhicule loué. Le chiffre d'affaires réalisé par l'ensemble du groupe G 7 (qui est aussi propriétaire du service de location de voiture ADA) atteignait 1 097 millions de francs et ses bénéfices, 96. Avec de tels chiffres, les locataires des taxis savent que ce sont les actionnaires de ce groupe qui s'engraissent en ramassant les bénéfices de leur travail 7 jours 7.

Laurent

SAINT-OUEN

Un boulevard urbain à Victor Hugo ?

Il y a 30 ans ce devait être une autoroute. C'est maintenant un boulevard urbain qui va couper le quartier Victor Hugo et amputer une friche. Le problème, c'est l'autoroute A15 qui vient de Cergy et qui s'arrête à Gennevilliers. Il faut, paraît-il, une voie plus rapide qui évite aux voitures de se perdre dans Clichy ou de faire un détour pour rejoindre Paris. Le ministre des transports, Monsieur Gayssot, l'a confirmé le 20 juillet 2000, le boulevard urbain est inscrit au contrat de plan Etat-Région pour un montant total de 300 millions de francs. Le 12 décembre dernier, les maires de Clichy et de Saint-Ouen s'accordent sur un projet de "réalisation d'un boulevard urbain aérien entre le boulevard Victor Hugo et la voirie parisienne [Porte Pouchet] avec deux fois une voie, un site propre de transport en commun dans chaque sens".

Et pourtant la mairie de Saint-Ouen avait obtenu en 1989 l'enfouissement du RER, au même endroit, afin d'éviter la coupure du quartier. Depuis 10 ans, elle exige "l'abandon de tout projet routier en surface" et la "création d'un parc urbain sur les terrains de l'Etat" (juin 1996). Maintenant que ces terrains lui appartiennent ce n'est plus à l'ordre du jour. Mais les institutions concernées, le Conseil de Paris, le Conseil régional, le tout récent Plan de Développement Urbain (PDU) nous gavent de mots tels que : "écologie urbaine, circulations douces, réduction des bruits, transports collectifs, développement du fer et du rail" et la loi sur l'AIR de 1996 qui recommande la diminution du trafic auto ! Et là, ils créent un couloir à bagnoles sous les fenêtres des HLM.

A raison de 2800 voitures à l'heure, comme le montre le comptage au pont de Gennevilliers, même si la ville de Saint-Ouen confie à l'architecte Roland Castro la responsabilité d'habiller ce boulevard et de construire sur ce qui restera de la friche du RER, même avec des arbres, même avec une piste cyclable en bordure, même à deux voies, ça reste une grosse route bien bruyante et bien polluante. A Clichy, ce boulevard urbain est attendu comme une solution miracle. Mais cet entonnoir risque d'être très vite saturé et les voitures se répandront à nouveau et dans Clichy et dans Saint-Ouen. La A15 a été conçue à une époque où l'on ne pensait qu'à la bagnole. Aujourd'hui améliorons les transports en commun. Par exemple, davantage de régularité et de fréquence du RER C, des liaisons inter-banlieues, le billet moins cher, et pourquoi pas une gare d'eau sur la Seine à Saint-Ouen. Faire ce boulevard c'est continuer le "tout voiture" d'il y a 20-30 ans, c'est polluer davantage un quartier déjà saturé, après une consultation pour la forme, c'est mépriser les habitants. Un pétition circule. Le Dimanche à 14H00 venez en parler sur la friche (sortie du RER rue Arago).

Jean Desprez

Quel avenir pour les jeunes ?

Pendant la campagne des municipales, un tract de 12 pages, du candidat De La Rochette s'en prenait aux "petits voyous" et nous promettait une police municipale avec des commissariats "à Debain, Payret, Michelet, Montmartre et au Vieux Saint-Ouen", soit six commissariats au total sur la ville. La Gauche, elle, préfère vanter son CLS, contrat local de sécurité, qui réunit, autour du commissariat existant, tous les "acteurs sociaux". Plutôt que d'insécurité, car peu de gens, même la nuit, craignent d'être agressés à Saint-Ouen, on parle souvent d'"incivilités". Ce sont des poubelles, des voitures qui sont "agressées". Mais une poubelle qui brûle peut mettre le feu à un immeuble, un téléphone public devient inutilisable et ce ne sont pas les riches qui s'en servent. Parfois on s'en prend au sac à main d'une personne âgée. Mais la délinquance actuelle - car la délinquance a toujours existé - se situe ailleurs. C'est le "business". La drogue, bien sûr, mais aussi les véhicules, les téléphones portables, les pièces détachées, etc. Il concerne une infime minorité des jeunes, chapeautés, il ne faut pas l'oublier, par des adultes.

 

Le journal Le Parisien du 10 avril donnait la parole à un jeune délinquant de Rosny-sous-Bois. "Les richards, selon lui, sont d'un côté et nous de l'autre. On n'y peut rien. Tu feras jamais taffer quelqu'un pour un salaire d'emploi-jeune alors que le business rapporte dix fois plus sans se bouger". Et encore, les emploi-jeunes, c'est récent. Avant, pour beaucoup, la perspective, c'était le chômage. Au lieu de multiplier les commissariats, ce sont les emplois qu'il faut créer, en finir avec le chômage. Et, évidemment, pas avec les salaires d'emplois-jeunes ! Après seulement, on pourra reprocher à certains de faire du "business" ou des "incivilités" au lieu de travailler honnêtement. Mais les entreprises licencient, bien souvent dans le seul but d'augmenter leurs profits. Il ne faut donc pas oublier que les jeunes, même délinquants, sont d'abord des victimes. Et que les responsables, ce sont d'abord les patrons et leurs courses aux profits. "Les richards sont d'un côté et nous de l'autre. On n'y peut rien", dit notre jeune de Rosny. Il a bien conscience de faire partie des ouvriers, des travailleurs, des pauvres, mais "on n'y peut rien". Alors on se met à faire du "business", en plus petit que les patrons qui font des affaires et finissent "mis en examen pour corruption". Les grands s'en sortent. Les petits businessmen, eux, ne peuvent espérer que de petits moments de "belle vie" entre deux séjours à la prison de Rosny-sous Bois, Villepinte ou Fleury-Mérogis.

L'avenir pour les jeunes, ce n'est pas de ressembler aux businessmen de tout poil, petits et gros, mais de les combattre. Car ce sont eux qui ont créé cette société où l'on a le choix entre mourir de trop de boulot ou "mourir de trop d'ennui", mais dans la misère toujours. L'avenir n'est pas au "démerdage individuel", mais à la lutte collective pour révolutionner un monde pourri, le débarrasser des profiteurs et de leurs défenseurs qui oppriment les travailleurs vieux ou jeunes.

Loïc

ALSTOM TSO

Non à la discrimination !

Fin avril, un délégué est parti en préretraite dans le cadre du plan de suppressions d'emplois, en réclamant la modique somme de... 685 089,00 francs ! 68 briques et demie ! Son raisonnement est pourtant modeste. Embauché en 1973, il y a donc 28 ans, il n'a changé de coefficient qu'une seule fois, passant de monteur P1 à monteur P2, suite à une pétition de ses collègues de travail. Il a fait des calculs comme s'il avait évolué normalement, avec trois changements de coefficient au lieu d'un. Certains en ont plus. Et le résultat est là : impressionnant ! Un écart qui se creuse au fil des années, qui aboutit à 1820 francs par mois et qui se répercute sur toute la période de retraite, ça ne peut que faire une belle addition.

Tout le monde sait, sauf évidemment la Direction qui ne tient pas à le reconnaître, que le salaire d'un délégué est bloqué, parce qu'il est délégué. Mais lui-même ne s'est comparé qu'à la moyenne des autres ouvriers. Et il a comparé avec des salaires ouvriers amputés par le blocage des salaires depuis 3 ans à cause des 35 heures Aubry, du retard par rapport à l'inflation, et de l'augmentation continuelle de la productivité depuis les années 1982. Une augmentation de 2000 F pour tous les salaires ouvriers ne ferait que rattraper ce retard.

Loïc

Algérie

Un pouvoir assassin !

Pendant deux semaines, la répression des émeutes en Kabylie, par les forces de l'ordre, a fait plus d'une centaine de morts et des centaines de blessés.

L'assassinat d'un jeune dans un poste de gendarmerie a mis le feu aux poudres. Les jeunes se sont soulevés pour en finir avec la misère, le chômage, le mépris, l'absence de libertés, les exactions de l'armée et de la gendarmerie. Avec les groupes intégristes le pouvoir a négocié à plusieurs reprises. Avec les jeunes manifestants, il a tiré dans le tas. Les nantis avaient bien trop peur que la révolte ne s'étende à toute la population pauvre d'Algérie.

En ravageant le pays au cours de la guerre d'Algérie, en pillant ses richesses pétrolières et minières, en soutenant le gouvernement actuel, l'impérialisme français porte une grande part de responsabilité dans les évènements de la semaine passée, en Kabylie.

Léo

Le SMIC c'est rien, moins que le SMIC
c'est moins que rien !

La précarité explose, les minima sociaux et les salaires restent bloqués. Le gouvernement socialiste et les médias nous assurent que tout va mieux : baisse du chômage, reprise économique, budgets en excédents, etc. Mais à qui profite cette amélioration ? La reprise de l'emploi, c'est avant tout celle du travail précaire dans le secteur privé (Intérim, CDD, temps partiels imposés) et dans le secteur public (emplois contractuels, CES, emplois jeunes).Quand on travaille à mi-temps au SMIC, on ne sort pas de la précarité. Une société de plein emploi précaire n'est pas une société sans pauvreté. A qui veut-on faire croire que cette baisse du chômage entraîne une baisse de la pauvreté?

La situation des personnes exclues de cette reprise de l'emploi précaire, elle, ne bouge pas. Il est scandaleux que les minima sociaux restent en dessous du seuil de pauvreté qui est, en France, d'environ 4000 F pour une personne seule selon un calcul discutable. Le SMIC net est de 5617,20 F à temps plein donc 2808,60 F pour un mi-temps.

Le MEDEF, fer de lance du patronat, veut mettre au pas les travailleurs avec l'institution du PARE, c'est-à-dire le chantage pour faire accepter des boulots mal payés. Il faut se mobiliser contre les dispositifs du patronat mis en place avec la complicité du gouvernement "gauche plurielle" qui ferait mieux de s'attaquer à la misère et à l'injustice qui sont les véritables causes de l' insécurité et des difficultés quotidiennes des travailleurs.

Relou

Les sans logis s'invitent à la fac

Du 4 au 10 mai, douze familles (17 adultes et 23 enfants) ont occupé l'université de Saint Denis. Expulsées de l'immeuble qu'elles occupaient, qui devrait être détruit dans le cadre des travaux pour Paris 2008, elles ont d'abord cherché refuge dans la matinée à la bourse du travail, où la police les a délogées sur injonction de la mairie. Alors qu'une des familles attend depuis 1986 que sa demande de logement soit prise en compte, les élus n'ont d'abord proposé que l'hébergement pour quelques nuits à l'hôtel ! Avec l'appui du DAL et de Droits Devant !, les familles ont pu s'installer à l'université et continuer les discussions. 10 des 12 familles ont fini par obtenir un relogement, après cinq jours de négociations avec la préfecture, la ville de Saint-Denis et celle de Paris (où les enfants de quatre familles sont scolarisés). Deux couples, en voie de régularisation de leur titre séjour, sont encore dans l'attente d'un relogement. La mairie de Saint-Denis a promis d'aider à la régularisation des sans papiers qui font partie de cette action.

A Saint-Ouen, rien qu'avec l'immeuble réquisitionné rue Jules Verne et les habitants en grève de loyer à l'hôtel Lucia, c'est plus de 130 personnes qui sont aussi sous le coup d'une expulsion. Espérons que les pouvoirs publics n'attendront pas leur expulsion pour qu'un logement correct, et pas une chambre d'hôtel, leur soit enfin attribué.

Paul

Editorial

Tous ensemble, Tous ensemble,
oui, Contre les licencieurs

Il y a du nouveau dans la classe ouvrière.

Contre Péchiney à Marignac, contre Marks & Spencer, contre Alstom à Belfort qui jette à la rue 80 personnes du jour au lendemain, contre AOM et Air Liberté et bien d'autres, les travailleurs touchés par la fermeture de leur entreprise n'entendent plus se laisser faire. Des entreprises comme Lu-Danone font des bénéfices et se permettent de licencier. Les plans de licenciements se succèdent en rafale. A ce rythme nous sommes tous des licenciés en puissance.

Les Marks & Spencer de toute l'Europe manifestent à Londres le 17 mai, ceux de Moulinex à Paris le 19, la CGT appelle à une journée d'action le 22 mai. Mais surtout un appel a été lancé jeudi dernier par les travailleurs et les syndicats de Lu-Danone de l'usine de Ris-Orangis, auquel se sont joints ceux d'AOM, Air Liberté, Marks & Spencer en faveur d'une manifestation nationale contre les licenciements à Paris le 9 juin. Cet appel s'adresse à tous les syndicats, confédérations syndicales, organisations politiques et à toutes les associations de chômeurs qui entendent défendre les intérêts du monde du travail.

Il faut interdire les licenciements sous peine de réquisition dans les grandes entreprises, se lever contre la politique d'un gouvernement qui se dit de gauche et qui s'incline devant le prétendu "mur de l'argent". La manifestation du 9 juin, après la journée de la CGT du 22 mai, peut être une étape de la mobilisation pour l'interdiction des licenciements. De nombreux syndicats ont déjà donné leur accord. Le Parti Communiste, la LCR, Lutte Ouvrière également. Il faut que cet appel soit entendu et suivi partout. Il faut que les travailleurs se mettent à l'offensive face aux mauvais coups du patronat et du gouvernement.

 

 

 

 

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