S O L

Saint-Ouen Luttes

L'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes

Numéro 2 du 7 mars 2000

 

AGENDA MARS

€ Lutte des sans-papiers, Samedi 18 mars, à 15h à Paris Grande manifestation à l'occasion du 4ème anniversaire de la lutte des sans-papiers.

€ Contre la précarité et la flexibilité à la Poste, Vendredi 17 mars, à 20 h Réunion Débat, organisé par la CNT à la Bourse du Travail de St Denis, 11 rue Génin (M° Porte de Paris).

 

SAINT-OUEN

Gros plan sur la situation du logement

Avec la fin de la " trêve hivernale " pour le 15 mars va se poser à nouveau la question des expulsions des logements. C'est dans le domaine privé que les risques sont les plus importants ; dans le domaine public, les expulsions sont refusées par la Ville pour les personnes qui disposent d'un bail, mais elles peuvent se réaliser pour toutes celles qui résidaient avec des personnes ayant un bail mais qui ont quitté leur logement, ou encore pour celles qui ont occupé des logements sans titres de locations.

Un logement sur dix est vide.

Entre 1990 et 1999, la population a baissé de 6 % à Saint-Ouen d'après le dernier recensement de l'INSEE. Les naissances ont été plus importantes que les décès (solde naturel : + 3581) et il y a plus de personnes qui sont parties de la ville que de nouveaux habitants (solde migratoire : - 6202). On peut aujourd'hui se demander si la ville n'accueille pas plus les bureaux que les habitants. On peut aussi noter que le nombre de logements baisse un peu (- 252 logements) mais surtout que le nombre de logements inoccupés a augmenté d'à peu près 20 % entre 1990 et 1999. Un logement sur dix est vide. On peut se demander ce qu'il en est du bureau de réquisition des logements vides mis en place par la mairie et qui ne fonctionne pas.

La politique du logement en cause.

L'étude menée par l'Institut d'aménagement et d'urbanisme montre que le revenu mensuel moyen des ménages locataires des habitations à loyer modéré (11 688 F.) est plus élevé que celui des locataires du privé (10 188 F.) Au nom du refus de la ghettoïsation, la municipalité veut favoriser l'implantation des classes moyennes sur la Ville et n'est guère ouverte à l'accession au logement HLM des familles les plus modestes et au premier rang de celles-ci, celles de nationalité étrangère. La municipalité craint en fait qu'en délivrant des logements sociaux à ces populations les plus modestes qui résident dans le privé, leurs logements d'origine ne soient reloués alors qu'ils ne satisfont pas aux règles d'hygiène.

Au nom de la "mixité sociale", la Mairie tourne le dos à l'égalité sociale qui demande l'accès à des logements décents pour tous. Ainsi, au 10 avenue du Capitaine Glarner, des familles attendent depuis 19 ans un relogement alors qu'elles vivent dans des conditions désastreuses. Dans le numéro de Saint-Ouen Ma Ville de juillet, l'adjoint au maire chargé du logement, constatant le délabrement de logements privés, proposait d'inciter les propriétaires à les réhabiliter. La possibilité, donnée par la loi, d'obliger les plus récalcitrants à procéder à ces travaux était même signalée. Mais qu'en est-il de ces propositions ? Aujourd'hui ce sont les familles qui trinquent, pas les spéculateurs privés. Côté public, l'on sait aussi que la ville maintient des logements inoccupés et que certains des logements du parc HLM de la ville ressemblent trop aux taudis gérés par les propriétaires véreux.

Mais la politique municipale n'est pas seule en cause. Il n'y a pas de réelle volonté de résoudre le problème du logement à l'échelle du pays, et pas plus par ce gouvernement que par les précédents. La rareté des logements entraîne des loyers élevés. Une sélection s'opère par l'origine, la profession et bien sûr l'argent. La réalité sociale est celle de la précarisation des emplois (intérim, CDD, temps partiel, petits boulots) et donc des revenus, et des conditions d'accès au logement. Les pauvres du troisième millénaire vont-ils continuer à s'entasser à cinq par chambre dans les hôtels meublés ou dans des immeubles vétustes où l'on croise les rats dans la cour à la tombée de la nuit ? On croyait les bidonvilles de Saint-Ouen supprimés, ils prennent une autre forme !

Célie et Laurent

 

Une piscine "3 étoiles" ?

La rénovation de la piscine A. Delaune est en cours, et ces travaux sont estimés à 32.518.000 F (plus de trois milliards de centimes). Et les tarifs seront-ils aussi trois étoiles ?

 
ALSTOM SAINT-OUEN

Manifestations contre les plans de licenciements

« Nous exigeons le retrait de tous les projets de plans de suppressions d'emplois avec leurs cortèges de licenciements ! » : le 18 février, 400 travailleurs de l'Alstom TSO et SIF (Transformateurs St-Ouen et Signalisation Ferroviaire) manifestaient au siège de leur société, avenue Kléber à Paris, aux côtés de collègues de 8 autres sites du groupe Alstom, en particulier ceux de la Courneuve, mais aussi 50 travailleurs de Lys-les-Lannoy, près de Roubaix, dont l'usine est menacée de fermeture. Une occasion de se rencontrer, appréciée particulièrement par les "externalisés" de la SIF, plus de 120 travailleurs revendus à un sous-traitant basé à Argenteuil et à St-Denis, et qui ne sont donc plus de Alstom depuis un an et demi. Mais eux aussi sont menacés de licenciements. « Vous, vous n'êtes pas concernés » : ça c'est le refrain des directeurs, relayés par les agents de maîtrise dans les ateliers et bureaux, aussi bien à Belfort, où sont prévus 796 suppressions d'emplois, qu'à St-Ouen (TSO, où le chiffre est de 184 (soit 30 % du personnel). « Vous n'êtes pas concernés », c'est-à-dire : « Ne réagissez pas, contentez-vous d'espérer que vous ne faites pas partie de la charette de licenciements, et ne tombez pas dans une lutte de solidarité ! ». « Vous n'êtes pas concernés », nous disent les patrons, mais tout le monde est concerné ! Après Michelin ; après Moulinex, Alstom ; et demain ? Les Alstom prévoient une autre manifestation, encore plus large, le 15 mars, au siège de kléber à 10 H, puis vers Matignon. Car pendant que le patronat engrange les milliardset réduit les travailleurs à la misère, le gouvernement nous répète que la situation s'améliore. Ca suffit ! Non aux licenciements ! Nous sommes tous concernés !

Loïc

Alstom est une multinationale qui emploie 91 000 personnes dans 60 pays. Sa filiale commune avec ABB, ABB-Alstom-Power, emploie, elle, 54 personnes. Cette dernière a annoncé à elle seule, fin février, 10 000 suppressions d'emplois (près de 20 % du personnel), à La Courneuve, Belfort, Lys-les Lannoy, etc. mais les pays proportionnellement les plus touchés sont la Chine et l'Inde. Face à de telles mastodontes (total : 145 personnes !), les travailleurs ont intérêt à lutter au-delà des divisions en filiales, sans tenir compte des frontières.

 

LOIS AUBRY - LOIS POURRIES (suite)

Grève à la carrosserie Lecoq

Vous connaissez peut-être la Carrosserie Lecoq, en face du marché Ottino, de l'autre côté de la rue Schmidt. A y voir arriver régulièrement des Rolls et des vraies voitures de musée, vous imaginez peut-être que les ouvriers qui y travaillent ont de bons salaires. Mais non, les Rolls, ce n'est pas pour les ouvriers ! L'attitude du patron pour l'application des 35 H Aubry a déclenché la première grève de l'histoire du garage. Première proposition du directeur en décembre : baisser les salaires de 11% (35 H payées 35) ! Deuxième proposition : supprimer la 6ème semaine de congés pour récupérer 5%. Le 1er février, c'est la grève, jusqu'au vendredi 4. Les travailleurs décident de créer une section syndicale. Et 17 sur 30 se syndiquent. Finalement, le patron promet de payer les 5%, mais sous forme d'une prime compensatoire, pas par un maintien du salaire de base. Dans l'immédiat, on ne change rien : les heures supplémentaires après 35 H seront majorées de 10%, sous forme de minutes à récupérer (conformément à la loi Aubry). Rien n'est donc réglé. Mais une chose au moins est très claire : le patron est averti qu'il y a des limites et que les ouvriers ne laisseront plus faire n'importe quoi.

Loïc

NOUVELLE EXPLOITATION

Les « Emplois » sauce Aubry

La municipalité de Saint-Ouen a "embauché" sept jeunes dans le cadre des emplois-jeunes au titre de " correspondants de ville ". Leur rôle : renseigner les habitants et faire un soi-disant lien entre la population et la mairie. Toujours dans le cadre des " emplois-jeunes ", à Neuilly-Plaisance, centre de la Maltournée (93), une cinquantaine d'agents de proximité et d'environnement (APE), sous le statut d'emplois-jeunes, sont mis à la disposition de la RATP et de la SNCF pour cinq ans, payés 5100 F par mois. Ce salaire est subventionné à 80 % par l'Etat, et 55 F par jour par la RATP. Ils sont entrés en lutte le 21 février, et ont été rejoints par 17 de leurs camarades d'Aulnay qui travaillent avec eux sur la ligne de RER B. Ils ont ainsi rejoint leur 90 collègues des Hauts-de-Seine en grève pour les mêmes revendications. Les grévistes demandent à bénéficier du même statut que les emplois-jeunes de la RATP. Ils réclament 6000 F net par mois, des formations, des vêtements de travail adaptés au climat et la gratuité des transports sur les réseaux RATP et SNCF où ils travaillent.

Koé

CARTE SCOLAIRE

Suppressions de classes

Les conseils de parents d'élèves qui se réunissent fin février ont débattu des dispositions envisagées par l'Inspection académique. Celle-ci envisage une ouverture de classe à la maternelle Jean-Jaurès. En revanche, il est envisagé trois fermetures : à Zola, Victor Hugo et Bachelet. La Seine-Saint-Denis n'est pas le seul département touché par le projet de carte scolaire établie par le gouvernement, puisque cela touche également la plupart des départements, et les parents d'élèves multiplient les actions pour protester contre les suppressions de postes et les fermetures de classes. Le gouvernement joue la carte de l'austérité, alors qu'au contraire il faudrait embaucher, ouvrir de nouvelles classes et construire de nouveaux établissements scolaires. Et le refrain " le budget de l'éducation ne permet pas " ne passe plus. Chaque année, ce sont des milliards qui sont distribués sans compter au patronat. De l'argent, il y en a !

Koé

SAINT-OUEN

Les « Restos du Coeur » ne chôment pas

Ouverts en décembre 1997, les " Restos " de Saint-Ouen distribuaient de la nourriture à 450 familles (environ 1800 personnes) pour une période d'hiver de 3 mois. Ce chiffre a augmenté d'une cinquantaine de familles en 2 ans. Et 1999 a vu arriver de plus en plus de jeunes. Les critères d'inscription sont fixés pour une personne seule à 2800 F maximum, après avoir payé son loyer, charges comprises. Les " Restos " sont ouverts aussi de la mi-mai à fin juin et de mi-septembre à fin octobre. Durant cette période, pour en bénéficier, il faut que les ressources de la personne ne dépassent pas 1400 F. Cela touche environ 250 personnes sur Saint-Ouen. Durant les périodes d'ouverture, une quinzaine de bénévoles participent quotidiennement à la distribution, 5 jours sur 7. La France fait partie des pays les plus riches de la planète. Mais pour nourrir ses habitants, on doit faire appel à la générosité. Il faut inverser le cours des choses, que les travailleurs puissent avoir un salaire correct pour se nourrir, et pas aux " Restos du Coeur ".

Koé et Relou

SAINT-DENIS UNIVERSITÉ

A la fac aussi, régularisation de tous les sans-papiers.

 

L'Etat refuse à plusieurs centaines d'étudiants inscrits à la faculté de Paris VIII le droit d'étudier. En effet, malgré leur inscription à l'université, les préfectures d'Ile de France refusent de leur accorder un permis de séjour. Cette situation est intolérable, et, depuis le mois de novembre 1999, les étudiants se sont organisé de manière indépendante au sein du Comité de Lutte des Etudiants Sans-Papiers (CLESP). Depuis le 20 janvier 2000, les étudiants occupent l'amphi X pour faire pression sur l'administration et les pouvoirs publics. L'administration de l'université de Paris VIII doit défendre les droits de ces étudiants et les préfectures, et, à travers elles le gouvernement, doit reconnaître ce droit élémentaire de pouvoir étudier. Au lieu de celà les pouvoirs publics tentent de criminaliser le mouvement en l'accusant de dégradations dans l'université. Jeudi 2 mars, partie de la fac une manifestation a réuni plus de 400 personnes jusqu'à la mairie de Saint-Denis et montre la popularité de leur lutte. Quelles soient de droite ou de gauche les lois Pasqua, Debré et Chevènement sur l'immigration sont une atteinte à la liberté de circulation et d'installation et, comme le montre la lutte des étudiants, aussi au droit à l'éducation. Vous pouvez apporter votre soutien à la lutte des étudiants sans-papiers, Amphi X, Paris 8 Université Vincennes Saint-Denis à Saint-Denis.

Laurent

EDITORIAL

Deux poids, deux mesures !

Augusto Pinochet, le dictateur chilien, responsable de milliers de morts, torturés, disparus ne sera pas jugé pour ses crimes. En Grande-Bretagne, le ministre de l'intérieur travailliste a décidé de le libérer pour raisons de santé. A peine arrivé au Chili, Pinochet s'est levé mircauleusement guéri, de sa chaise roulante et a passé des troupes en revue. Le président socialiste chilien, fraichement élu, a envoyé sa police contre des manifestants réclamant que justice soit faite. Il ne veut pas mécontenter l'armée, la même qui en 1973 avait pourtant renversé le gouvernement socialiste d'Allende pour le compte des USA et de la bourgeoisie chilienne effrayés de la mobilisation des ouvriers et paysans. La France proteste platoniquement car le commerce avec le Chili passe avant tout. Pinochet reste donc libre. Par contre aux USA, cette grande démocratie où la peine de mort n'est toujours pas abolie, les éxécutions capitales se succèdent pour les prisonniers de droit commun,les prisonniers politiques et les innocents... En effet, depuis 1976, 85 personnes, dont l'innocence a été prouvée, ont été exécutées. Mumia Abu Jamal, militant du mouvement noir, depuis 18 ans dans les couloirs de la mort dans l'Etat de Pensylvanie, risque, après une parodie de procès, d'être exécuté à tout instant. Clémence pour les dictateurs tortionnaires, vengeance barbare pour les opprimés et leurs défenseurs, tel est le véritable visage de leur démocratie.