Saint-Ouen Luttes n° 7 - 30 septembre 2000

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EDITORIAL

Au nom de la "mixité sociale", on veut virer les pauvres !

 

Le Conseil municipal d'Aubervilliers, à l'unanimité (PC, PS... avec l'abstention... d'un Vert) a demandé l'expulsion d'une soixantaine de familles qui squattaient des logements sociaux (vides depuis plusieurs années) de la Cité de la Maladrerie. 23 familles ont déjà été expulsées en août et les autres risquent de l'être d'ici la mi-octobre. Celles qui sont encore dans les logements ont eu l'électricité coupée à la demande de la Municipalité qui s'est aussi opposée à la scolarisation d'une partie des enfants. A Saint-Ouen, la Municipalité qui avait déjà poussé à l'expulsion de tsiganes a essayé d'empêcher les squatters d'un immeuble d'obtenir l'accès à l'eau et au téléphone. A Montreuil, des familles qui occupent une maison appartenant à une société d'économie mixte se voient privées d'eau et d'électricité et menacées d'expulsion à la demande de la Municipalité. Celle-ci bloque en outre l'accès des jeunes enfants au service de la Protection de la Maternité Infantile (PMI). Les familles luttent contre ces atteintes à leurs droits minimaux : campement devant la mairie d'Aubervilliers, occupations de la mairie de Montreuil, d'agences d'Edf, de France Telecom, de la Générale des eaux et manifestations se succèdent.

Jack Ralite, maire (PC) d'Aubervilliers dans un entretien donné au Parisien considère que « La Seine-Saint-Denis, et plus particulièrement Aubervilliers, accueille de nombreux immigrés. Si ce mouvement continue, nous allons faire de ce département le plus solidaire de France un ghetto. Je m'y refuse. » Au nom du "principe de mixité sociale" les maires de la proche "banlieue rouge", souvent communistes mais le plus fréquemment à la tête de coalitions municipales avec le PS, veulent diversifier leur population. Le principe de mixité sociale, qui va être examiné au Parlement dans le cadre d'une loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains obligerait les communes des agglomérations de plus de 50000 habitants à avoir au minimum 20 % de logements sociaux. Il toucherait donc les villes bourgeoises qui n'ont parfois aucun logement social et qui disposeraient d'un délai de vingt ans pour rattraper leur retard. Mais on peut se demander si les futurs HLM du Raincy ou de Neuilly ne vont pas plus servir à accueillir les cousins des cadres des organismes de logements sociaux et les enfants des élus politiques que les balayeurs maliens. Les pouvoirs publics n'ont pas proposé aux familles expulsées d'Aubervilliers un HLM à Passy ou dans le XVI° mais des chambres d'hôtels pour quinze jours !

Aujourd'hui, rien n'est changé pour les villes bourgeoises, mais les représentants des villes et quartiers populaires utilisent le principe de mixité sociale pour freiner l'accès des familles pauvres aux logements sociaux. Les logements restent vides, en l'attente de la classe moyenne, et de vastes ensembles de bureaux se construisent, quand nombre d'autres restent à louer. La "mixité sociale" qui selon ses défenseurs parviendra à faire cohabiter les pauvres et les riches, sert actuellement à expulser les travailleurs sous-payés de leurs logements. Pour lutter vraiment contre la misère, il faut lutter ensemble français, immigrés pour l'accès à la santé, à l'éducation, aux services culturels, au logement pour tous ; contre l'exploitation, pour l'égalité économique et sociale.

Laurent

 
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